Installé discrètement dans une haie bordant un champ du Val Obscura, je profitais d’une belle soirée d’été en espérant voir bondir le lièvre observé récemment à cet endroit. Les minutes se sont égrainées lentement dans un calme reposant. Comme souvent, l’animal espéré a choisi de me poser un lapin, ce qui n’est pas vraiment surprenant de la part d’un lièvre brun…
Une fois le soleil caché derrière la ramure des sapins, un brocard est sorti du couvert forestier pour venir brouter au loin; trop loin pour faire une belle image, mais suffisamment prêt pour pouvoir l’observer attentivement à travers les jumelles. Le cri strident et caractéristique de la buse variable m’a rappelé que la nature était faite en trois dimensions. Perchée au sommet d’un sapin voisin, elle a longuement observé le sol à la recherche d’un rongeur imprudent avant de sortir de scène, sans doute déçue par la faible affluence de spectateurs à moustaches de sortie ce dimanche soir.
C’est mouvement furtif dans le champ qui m’a fait quitter la buse des yeux. Arrivé sans un bruit sur la pointe de ses pattes de velours, le fantomatique chat forestier est sorti de sa réserve forestière pour venir mulotter dans le pré. Ce discret habitant des forêts du Jura qui ne se laisse voir qu’en de très rares occasions est là, à quelques mètres seulement! D’abord concentré sur son trou de souris, le chat a rapidement plongé ses yeux verts dans les mien, intrigué par le bruit métallique du déclencheur. Malgré un camouflage de circonstance et une immobilité totale, le chat n’a pas eu besoin de longues minutes pour démasquer le photographe à proximité, et a opté pour un repli stratégique à l’abri de la forêt. La rencontre aura duré une minute, deux au plus, mais quelle intensité, quelle émotion…
Encore retourné par cette rencontre inattendue, ce n’est qu’après avoir passé de longues minutes à analyser la morphologie et le pelage rayé du petit félin que j’ai eu la pleine certitude d’avoir passé un moment privilégié les yeux dans les yeux avec le chat forestier.
Val-de-Travers, le 12 septembre 2016
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