Chaque année à la sortie de l’hiver, j’aime rejoindre les pâturages boisés d’altitude pour assister une seconde fois au réveil de la nature. Si le printemps est déjà bien installé en plaine et au fond des vallées jurassiennes, la neige prend son temps pour se retirer des crêtes. Elle retarde ainsi un peu l’explosion de couleurs printanières. Les herbes blafardes qui se teintent progressivement de vert, les premiers bourgeons qui se gorgent de sève et les crocus, blancs et violets, qui percent ça et là le sol sitôt la neige évaporée: le tableau se répète inlassablement chaque année, mais que c’est beau…
Au cœur de ce décor enchanteur, les habitants de bois s’activent également. Au loin, une renarde au ventre bien rond traque frénétiquement les campagnols. Deux chevreuils semblent ivres de joie en se gavant d’herbes après une longue diète aux lichens. Les oiseaux emplissent la cathédrale forestière de leurs chants gais et variés. C’est dans ce cadre idyllique que je m’installe au pied d’un arbre en espérant que l’ami aux longues oreilles observé la veille sera au rendez-vous.
Le lièvre brun ne tardera pas. Il sort du bois une demi-heure après mon arrivée et rejoint un buisson pour faire une sieste. Après une petite heure de repos, il s’étire, se toilette puis grignote quelques herbes avant de replonger dans un profond sommeil. La vie de lièvre semble décidément épuisante… C’est le chant mélodieux d’un malicieux rouge-gorge qui tirera le lagomorphe de ses songes. Posé à quelques centimètres du lièvre, le petit passereau lui offre un tour de chant avant de s’en aller en sifflotant.
Un lièvre brun ponctuel, un rouge-gorge ménestrel et des crocus envahissant les cimes du canton de Neuchâtel; le printemps s’annonce exceptionnel.
Val-de-Travers, le 19 avril 2019
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